Les gabarriers et le vin de Bordeaux à Meymac
Argentat
Les gabarriers de corrèze et le vin de Bordeaux.
Autrefois les bateaux circulaient sur la Dordogne. Il y avait des bateaux de pêche et des gabarres, conçues pour le commerce.
Sur la haute-Dordogne, à partir d’Argentat (en Corrèze), on fabriquait des bateaux plats qui servaient à transporter le bois (merrain, madriers, carassonnes) vers les tonnelleries du pays bas.
Il y avait plusieurs types de gabarres. Cela dépendait surtout de la profondeur de la rivière.
Argentat était le port de rassemblement des gabares descendues de I’amont, du haut pays, et qui y arrivaient en général à demi chargées par suite de difficultés du parcours. On complétait là leur cargaison et, après un arrêt de trois ou quatre jours et un pèlerinage à Sainte Madeleine qui se terminait par une longue procession jusqu'au quai, elles repartaient en flottes plus un moins nombreuses. C'étaient alors sept, huit, une douzaine, parfois plus, de bateaux se suivant en file, qui descendaient ainsi vers l'aval, vers Souillac, Limeuil, au confluent de la Vézère , La linde, Bergerac, et parfois jusqu’à Libourne. Avec le courant, le voyage était rapide, de quatre a six jours, parfois huit d’Argentat à Bergerac. Certains bateaux pour mieux vendre leur cargaison, continuaient au-delà, jusqu'au confluent du Bec d’Ambès, pour remonter jusqu'à Bordeaux avec la marée. Mais ces voyages étaient exceptionnels.
Arrivé à destination, le bateau était vendu avec sa cargaison, soit à part, au quart ou au cinquième de sa valeur d’origine. S’il était encore en bon état, il était parfois conservé, après avoir été renforcé, pour servir d’allège. Sinon, il était " déchiré ", c’est-à-dire démoli, pour fournir du bois de chauffage ou de clôture.
A partir de SAINTE-FOY, la rivière est plus profonde et le commerce des vins était dominant. On utilisait alors des gabarres avec des coques arrondies et beaucoup plus belles. On les chargeait avec du vin et des pierres de carrière. Elles allaient à BORDEAUX pour vendre leur cargaison. Dans le port de Bordeaux, il y avait des gabarres venues de la haute Dordogne et de magnifiques trois mâts venus d’ Amérique. Les échanges se faisaient sur le port. Le vin partait pour la Hollande ou l’Angleterre. Les gabarriers achetaient les produits exotiques (sucre,café,tabac,coton,indigo) mais aussi du sel, des céréales....qu’ils ramenaient au pays.Aujourd'hui,il subsiste quelques gabarres,dont certaines à moteur qui servent uniquement à des promenades touristiques.
Négociant en vins de grands crus
Pour les habitants du plateau de Millevaches, région de Meymac, d'Argentat, à l'origine paysans ignorant tout du vin, ils se sont faits négociants en crus de Bordeaux, certains réussissant à vivre sur place, d'autres sont allés jusqu'en Belgique pour la vente de porte-à-porte et sont parvenus finalement à acheter de la vigne et s' implanter par ce moyen dans le bordelais.
Le parcours du précurseur Jean Gaye-Bordas (1826-1900) vaut le détour.
Jean Gaye-Bordas dit "barlet" (petit tonneau) fut le créateur du négoce en vin de Meymac...
II naît dans un petit village, Davignac, près de Meymac, au début du XIXème siècle en 1826.
Comme tous les jeunes paysans de ce pays pauvre, il fait face à de nombreuses difficultés. En effet, à cette époque, certains partaient à Paris comme cochers de fiacre tandis que d'autres travaillaient dans la forêt des Landes. Lui, ne sait ni lire ni écrire mais il a l'esprit vif, son oeil pétille d'intelligence, et il a le port altier. II devient, tour a tour, colporteur, marchand de parapluies, chiffonnier et se retrouve à Bordeaux où il vend les lampes à pétrole du milliardaire Rockefeller. Il remarque qu'un greffier de la région envoie du vin à un de ses frères à Lille. Il saisit alors l'opportunité de vendre du vin de Bordeaux dans le nord sous I'étiquette "Meymac-près-Bordeaux". II suit les vendeurs de toile qui remontaient vers le Nord et en profite en même temps qu'il place ses lampes pour placer son vin. Le succès fut immédiat et ce fut le début de la richesse. Quelle était sa technique ? Il se présentait dans le Nord du pays comme un vigneron écoulant lui-même sa production. Ses bons de commande étaient de simples bouts de papier sur lequel le client inscrivait son nom. Après quoi il revenait en Corrèze, faisait expédier la marchandise et ce n'est que lors du voyage suivant qu'il encaissait le prix de la vente. Il proposait un vin qu'il ne possédait pas et dont il n'avait même pas un échantillon. Pour mettre ses interlocuteurs en confiance, il parlait d'une appellation qui allait devenir célèbre "Meymac-près-Bordeaux"
Il avait ouvert la voie, bien d'autres vont s'y engouffrer qui vont réussir de forts coups commerciaux. Avant la fin du XIXème siècle le massif central est une région viticole importante : le phylloxéra n'a pas encore frappé et la production de "piquette" est importante; la consommation locale est réduite par l'insuffisance de moyens, il faut donc l'écouler. Il s'établit au fil du temps le circuit suivant : nos négociants affrétent des gabares puis des wagons pour descendre, vers Libourne et Bordeaux, les merrains nécessaires aux tonneliers. A Libourne et Bordeaux, après qu'on leur ai apprit que leur "piquette" en était vraiment et qu'il n'y avait aucun débouché pour elle, ils achètent du "Bordeaux" pour le ramener via Meymac et le vendre à Paris et plus haut dans le nord, en Belgique, puis via la Belgique au Royaume-Uni .
(source:19 corrèze)
Voir aussi:
https://www.tourismecorreze.com/fr/meymac-pres-bordeaux.html